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samedi 27 décembre 2014

Le collège de Nagou



Comédie dramatique en trois actes 


Staring : Patrick et les comités de Nagou.

Lieu : réfectoire de l’école de Nagou,



Un apatame ? 

Non, le nouveau collège de Nagou. Derrière, à gauche, la maternelle

70 enfants répartis dans deux classes de 6e et de 5e.


Prélude 

 

Lors de leur dernier voyage d’octobre, Patrick et Pierre-Louis ont découvert avec stupéfaction un « collège » que les villageois avaient construit sans prévenir.
Aujourd’hui, 70 ados, au lieu d’aller au collège d’état de Nano, suivent leur 6e et leur 5e à Nagou. Mis devant le fait accompli et pris de court, nous avons quand même acheté les livres de classe. Puis nous avons réfléchi aux conséquences de cette création de collège. Pour l’éducation nationale togolaise ce faux-collège de Nagou est un collège privé, et il restera privé sans aucune chance de réintégrer le giron de l'état. Les conséquences sont lourdes : recrutement des profs par les parents donc niveau non garanti,  profs payés par les parents et, à la sortie, diplôme non reconnu par l’état. Une catastrophe donc pour ces jeunes collégiens dont la seule chance de s’en sortir et de tirer leur pays vers le haut, est l’éducation. Catastrophe aussi pour les parents qui se mettent pour des années une charge financière supplémentaire sur le dos alors que l’état togolais pourrait le faire. Il faut donc que nos amis de Nagou le comprennent.

Patrick et notre traducteur du jour, un prof du « collège » des parents



Acte I : explications et confrontation


Nous sommes avec les comités de Nagou : eau, grottes, développement villageois, parents d’élèves. L'un des profs du « collège » est avec nous et assure la traduction.  Le RCD* a déjà fait un gros travail de sensibilisation. Cela chauffe un peu. Les comités savent qu'ils ont fait une erreur et la discussion est animée. Malgré tout le ton monte. Le moba (langue locale) prend vite le dessus et la traduction ne suit pas. Nous sommes noyés. Chacun rejette la responsabilité sur les autres. Puis le calme revient. Patrick a un grand classeur rouge à la main. Il leur explique comment nous travaillons une fois que nous avons arrêté ensemble les projets de développement : liste de priorités, contacts avec les entreprises, devis, établissement des budgets... Les pages défilent et les tableaux excel, surlignés en jaune, aussi...

Acte II : réaction


Blam ! « Poubelle ! » D'un grand geste théâtral, Patrick jette le cahier par terre (merci, il va bien, il s'en est remis). Il fait comprendre aux villageois, à grand renforts d'images et de paraboles, que leur initiative remet en cause l'harmonie de nos relations basées sur la concertation. Pas question non plus de construire un collège pour les seuls 1000 habitants de Nagou. Les villages doivent s'unir et se concerter. Il en profite donc pour introduire la notion de communauté de communes. Patrick est assez violent dans ses propos et évoque assez énergiquement que nous puissions quitter Nagou et nous occuper d'autres villages. Puis il leur explique les problèmes privé-public et que cela prend à peu près deux ans pour obtenir les autorisations et accréditation auprès du ministère de l'éducation togolaise. Ce n'est pas en construisant un simple apatame et en l'appelant collège qu'on commence le processus. Un collège ne s'improvise pas. Notre ami Patrick l'Africain, passionné et convaincant, est grandiose.



Acte III : quelle solution ?


A court terme nous avons deux classes d'enfants de 6e et 5e qui risquent de rester sur le bord de la route. Patrick donne donc le choix suivant aux villageois :
  • soit ils continuent leur faux-collège avec les conséquences exposées plus haut. Ce sera alors sans nous. Et sans l'OCDI**, avec lequel nous nous sommes concertés. C'est un non ferme et définitif, coup de pousse ne continuera pas ce collège-là.
  • soit on arrête là l'expérience, les jeunes réintègrent le collège d'état qu'ils devraient fréquenter. Dans ce cas nous remettons à l'ordre du jour le programme de distribution de vélos prévu afin de les aider dans leurs déplacements.
En fait le lendemain et suite à des discussions avec les trois autres villages, une troisième solution se dessinera : construire un apatam amélioré (bâtiment en dur mais sans les murs), transformable par la suite en bâtiment complet qui sera le collège. Deux conditions impératives pour cela : que les quatre villages se mettre d'accord sur un site de construction (pas question qu'on s'en mêle) et également que le ministère de l'éducation nationale togolaise nous donne le feu vert. Le collège serait alors agréé à posteriori. Cette excellente idée nous est soufflée par Mamadou Batouré, membre du RCD et l'un de nos traducteurs du jour.


Le comité des femmes de Nagou, l'un des villages du plateau où celles-ci sont le mieux représentées

Epilogue

La réunion se termine. Nous demandons aux comités d'en parler aux villageois de nous donner leur réponse rapidement. Nous en profitons aussi pour discuter avec les profs de collège recrutés par les parents. Ils sont inquiets pour leur poste mais nous font une excellente impression. Peut-être sera-t-il possible avec un complément de formation de les garder pour le futur collège ?
Patrick l'Africain a été superbe. Un gros travail de sensibilisation avait déjà été fait mais cette discussion était très importante. Nous ne doutons pas de leur réponse. 




* Rotary club de Dapaong, nos partenaires togolais
** émanation de Caritas international, partenaire d'un donateur allemand qui a fait construire trois classes de primaire à Nagou début 2014. Nous essayons de travailler en coordonnant nos actions.






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